Ma recherche alliant dessin, collage, peinture, sculpture, porte sur la mémoire d’un événement. Par des traces, je cherche à capter le passage de ce qui advient et de ce qui disparaît. La matérialité des surfaces, telle une membrane, agit comme capteur de cet instant.

Depuis plus de 30 ans, mon œuvre se développe à l’image de la création du monde dans sa pluralité. Par mes explorations à l’atelier, j’ai le sentiment de revivre l’enfance de l’humanité avec ses premiers gribouillis. J’ai façonné une genèse avec des graines géantes et des nids stratifiés. J’ai modelé la formation de la terre avec ses mouvements tectoniques. J’ai peint le visage de l’homme dans sa multiplicité à travers le temps et des oies en vol semblables à des traces fossiles. J’ai assemblé de petites nébuleuses en fibres nous ramenant aux confins de l’univers. À chaque étape, je réalise un inventaire exhaustif du sujet – dessiné, peint, sculpté – produisant ainsi, dans le temps, de nombreuses séries.

La matière première – argile, fibres naturelles entre autres – est constitutive de ma démarche. Durant le processus, j’explore différentes interactions entre les matériaux pour les transformer et les amener à changer d’état. L’atelier, devenu laboratoire d’alchimie, matérialise des métamorphoses faisant écho aux processus psychiques.

La trace, fondement de mes recherches, fait référence aux vestiges du passé liant mon histoire à l’histoire des hommes. Elle fait intervenir l’inconscient et le hasard comme prémisse à toute création. Je m’intéresse à son potentiel de figuration et d’abstraction simultanément. Par la représentation de lieux, de visages, d’indices dessinés, peints, sculptés, je cherche à en capter la nature éphémère.

Le passage situe l’ensemble de mes travaux à la frontière entre fini et infini propre au mystère de la condition humaine. Je m’intéresse au rapport entre le corps du dessin-peinture-sculpture, défini dans sa forme et limité dans le temps, et le vide, cet espace qui nous englobe, nous précède et nous suivra.